Quotas francophones: 20 ans de défiance

Depuis 1996, les radios privées sont tenues de diffuser au moins 40% de chansons francophones, dont la moitié (soit 20% du total) de nouveaux talents. Cette mesure a pour vocation d'encourager la production d'œuvres en langue française, alors que l'anglais serait plus spontanément plébiscité par de nombreux artistes nationaux, en leur assurant des débouchés radiophoniques. Il est à noter que le critère est la langue employée et non la nationalité de l'artiste. Les défenseurs de cette réglementation la justifient par la nécessité de sanctuariser la production française face à la pression des œuvres anglo-saxonnes à laquelle les radios commerciales ont tôt fait de succomber. Ses détracteurs y voient au contraire une mesure liberticide, ingérance éditoriale inacceptable de la part de l'État, qui ne laisse d'autre choix aux programmateurs et directeurs artistiques que de sélectionner des titres médiocres dans le simple but de remplir les quotas. En clair, si la production française était de qualité, il n'y aurait pas besoin de quotas pour la promouvoir.

Mais laissons (temporairement) de côté ces débats politiques pour examiner la façon dont les intéressées, à savoir les radios privées, se débrouillent pour rentrer dans les clous en prenant le moins de risques possible quant à leurs parts de marché (et donc leurs recettes publicitaires). Celles n'étant éligibles à aucune des dérogations prévues par la loi ont l'obligation de remplir leurs quotas aux heures d'écoute significatives, c'est-à-dire entre 6h30 et 22h30. Il n'est donc pas possible de finauder en diffusant sa programmation française la nuit. Il est en revanche parfaitement envisageable de la regrouper à des horaires réputés creux, tels que le dimanche matin. Par ailleurs, il est possible d'en diminuer l'impact sur l'auditoire en la calant pendant des décrochages. En effet, la pige (c'est-à-dire la surveillance et l'analyse des titres joués) des radios nationales est faite sur la diffusion parisienne; celles-ci ont donc toute latitude pour remplir leurs quotas sans que les auditeurs en province n'entendent un seul morceau français. Autre technique de gruge classique: la durée des titres; elle doit être d'au moins 1min10s. Il suffit donc de fabriquer des versions compactes de cette longueur pour diviser en moyenne par trois le temps attribué à la musique française pour le même résultat. Enfin, les chansons interprétées partiellement en français sont aussi comptabilisées; ce qui inclut les titres étrangers dont une partie a été traduite dans le seul but de s'assurer une meilleure diffusion en France, mais aussi ceux essentiellement instrumentaux avec seulement quelques mots prononcés en français.

Plus d'infos sur la réglementation:

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